Subprimes, c’était clairement pour vous supprimer
C’était un pont de gloire vers votre exclusion
Tu voulais être et vivre comme tout le monde
Tu végétais, pris entre tes guillemets
Toi aussi aurais mérité ta pagode
Comme les autres humains ta propre maison
Quand la jeune commerciale trop bien habillée
Est venue pour te faire visiter les lieux
C’est toute la famille qui s’est agenouillée
Des gens qui pourtant ne croyaient plus en Dieu
Tu as eu un peu peur et surtout lorsque
Tu as entendu le mot hypothécaire
Que les subprimes étaient des prêts à haut risque
Les subprimes jouaient c’est vrai ton avenir
Pour une fresque tu as hypothéqué hélas
Tes chances futures et mis au défi le pire
Déshonneur, humiliation et les rapaces
Ont fait de vous ces désorientés, ces fous
Sans toits, mais des célébrités, pauvres clous
De la loose, pauvres bouffons de la télé
Vous aviez aussi le droit de polluer
Dans vos lotissements hâtivement éclos
Cabanes de plâtre qu’on appelle pavillons
Comme des dartres sous les perpétuels pots
D’échappement de vos obèses véhicules
Copiées-collées, zones de démangeaisons
Finissent en purée, en buissons ridicules
Que des gens pauvres aient un tant soit peu l’air riches
Ca ne pouvait qu’agacer, gratter, gêner
Comme à la bourse, tu le sais, sans capital
Tu dévisses, à coup de pieds vers la corniche
Toi le chiche qui pleurniche, seras l’abyssal
Raté, le caniche mal peigné, sans bakchich
Tu vas retourner à ta friche, à la niche
Dans ton trou d’obus, dans le jus de ta honte
Rejoindre ta famille en état de choc
Dans cette tempête financière qui se démonte
La seule option à l’horizon c’est faire bloc
Cette crise-là ne causera aucune émeute
Ni manifestation, piquet ou pancarte
Là c’est toi mon gars qui signais le contrat
Ce sont quatorze jours si tu te rétractes
Où tu peux annuler abracadabra
Quinzaine où tu as écumé les bistrots
Célébré tout ce tralala en grande pompe
T’illusionnant profond en pleine victoire
T’esclaffant devant un si aisé triomphe
De ce tour de force au moyen d’un seul doigt
Un doigt d’honneur à cette honte héréditaire
Qui vengera ces générations à plats
Convoitant encore le dessus de zéro
Tu as spéculé à tort qu’un bras de fer
De pacotille pouvait être la voie royale
Que ce dénouement porté à ta hauteur
Serait l’ouvre-boîte délivrant de ce mal
Qui depuis loin te tient la gorge et le cœur
Cette disgrâce qui en tous points te paralyse
L’infériorité qui marque au rouge ton âme
Ce message caché qui toujours te dégrise
Refrain lugubre comme un tatouage toxique
Outrages te privant parfois de toi-même
T’ayant même institué jouet public
Variable d’ajustement, remplaçant, pantin
Tu pensais exorciser par ton château
Ce sceau posé jadis sur ton cuir trop brun
Retrouver enfin le printemps de ta peau
Le monde entier t’a trouvé sur les genoux
Déjà avant, et après, et pour toujours
Pauvre fou, amoureux de ta destinée
Dévot idolâtre d’une pensée mort-née
En criant toujours ton amour, tu es l’or
Qui nourrit ces tableaux vivants et leur thème
Récurrent, du fond des intrigues le trésor
Des écrans. L’injustice est la valeur même
Qui fonde l’entertainment, le fil des histoires
Dont tu te gaves bien plus que de temps en temps
Tu n’aimes rien que l’âcreté des romans noirs
Où femmes et hommes sont déshabillés, livrés
Ballotés par le hasard ou par des mains
Mauvaises et sans charité, qui les écrasent
Ton œil fasciné ne songe qu’à épier
Le trou des scènes d’arbitraire réitérées
Jusqu’à la nausée, les points précis de honte
Qui te parlent de toi dans les très anciens contes
De misères et de vicissitudes, l’extase
Qui te rassure, là où tu te sens chez toi
Une vase où tu aimes te baigner, la base
Où tu peux te reconnaitre avec effroi
Ce sera toujours ça de plaisir, de joie
Même si tu es toujours seul dans ce partage
L’héritage triste du vaincu sert à tout
Cette part congrue que tu rognes dans ta cage
Est resservie aux infos, vendue bien haut
Indignations, incantations, compassions
Ta charité est ce fabuleux fourre-tout
Où tu n’es jamais égal, ni sociétaire
L’abandon seul t’y sera un compagnon
En creux dans ces histoires qui tutoient l’enfer
Où tu dois rester à ta place, disponible
Pour servir, non pas travailler, mais servir.
Tes espoirs seront de lire la Sainte Bible
Ou rêver devant les films à ta mesure
Ou jouer à des jeux d’argent, de vampires
Mais tu ne retrouveras pas ta masure
Tant que ton stupéfiant refuge, Étranger,
Sera la honte, celle dont tu dois te défendre
Âprement, car il est bon que tu sois né
Et maintenant nous aimerions bien t’entendre
N’est-ce pas ? Les Subprimes, appelés la mort-gage
Hameçons habiles à te vendre et te revendre
Pour l’emballage, le parcage ou l’attelage
S’ils t’ont supprimé, te voilà au pointage
Ce n’est pas la résilience qui te rend si
Valeureux mais la faim qui t’aura ranci
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